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La Carazette des marchés – Octobre 2021

par Yohann Derbyshire

La Carazette des marchés – Octobre 2021

La Carazette des marchés

Octobre 2021

ICO: Quand s’introduire en bourse devient ringard, les ICO sur le devant de la scène

Les méthodes de financement des entreprises ont beaucoup évolué ces dernières années. L’Initial Coin Offering (ICO) se démarque depuis 2017 avec le développement de la notoriété des crypto-monnaies. Il s’agit d’une levée de fonds en crypto-monnaies majoritairement utilisée par les start-up de la blockchain qui n’ont pas encore lancé de produit ou de service. Contrairement à sa cousine historique, l’IPO, Initial Public Offering, l’investisseur ne détient aucune part du capital de l’entreprise lors d’une ICO.

Pour lever des fonds en ICO une entreprise doit émettre des actifs numériques que l’on appelle Tokens. La loi PACTE définit les Tokens comme “tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant d’identifier, directement ou indirectement le propriétaire dudit bien”. Pour en acheter, les investisseurs doivent envoyer des crypto-monnaies, principalement les plus grandes comme le Bitcoin. Ces tokens serviront ensuite à utiliser les services de l’entreprise, les investisseurs peuvent revendre ces mêmes tokens sur des plateformes d’échange de crypto-monnaies, les plus connues étant Etoro, Kraken et Binance.

En 2018, plus de 13 milliards de dollars ont été levés via des ICO dans le monde, contre 4 milliards de dollars en 2017, des chiffres en perspective avec par exemple 46 mds USD levés via IPO aux Etats-Unis en 2018. La plus grosse ICO réalisée est celle de EOS (EOS est une organisation autonome décentralisée capable de faire tourner des applications de taille industrielle, en éliminant les frais de transactions et en pouvant réaliser, à terme, des millions de transactions par seconde*), à hauteur de 4 milliards de dollars sur 341 jours, qui est un système d’exploitation qui ne répond à aucune instance de contrôle. En effet, celle-ci fournit un environnement de développement pour applications ayant un lien avec la blockchain.

Ce modèle de financement est avantageux pour 3 raisons :

  • Il permet de lever rapidement des fonds : le fonctionnement est presque le même qu’une campagne de crowdfunding, il suffit de créer une page internet et de présenter son projet. Les ICO durent généralement 1 mois et certaines réussissent à lever les fonds nécessaires en quelques heures voire quelques minutes
  • Il permet de lever beaucoup d’argent : contrairement au crowdfunding les projets des ICO sont internationaux, n’importe qui peut y participer, cela augmente donc la chance d’avoir plus de fonds.
  • Il permet de créer une communauté autour d’un projet : en achetant un token les investisseurs participent à la valorisation du produit de l’entreprise.

Malgré l’effervescence de ce type de financement, il n’existe aujourd’hui peu d’encadrement pour les investisseurs. L’AMF a notamment en 2019 rendu optionnel un visa qui permet de délimiter les conditions d’une ICO. Il est vraisemblable que la réglementation tend à se renforcer notamment suite à des échecs post ICO. Au global, en 2017, 59 % des ICO ont été des échecs soit pour cause de non réussite de lever de fonds ou d’arnaques tout simplement.
De plus, il est difficile pour un investisseur de juger la qualité et la pertinence d’un projet qui n’existe pas encore, rendant les ICO généralement très risquées. Les tokens étant libellés en crypto-monnaies, leurs valorisations dépendent énormément de la volatilité de ces devises rendant l’investissement encore plus risqué.

Pour toutes ces raisons, il convient de faire preuve de prudence lors d’un investissement dans une ICO. L’avenir permettra de mieux encadrer cette méthode de financement ainsi que celle des crypto-monnaies associées.

*Source Wikipédia

 

Energie et inflation : un mélange explosif

Le dernier soutien à l’inflation ? L’énergie ! Depuis le début de l’année, les cours ont augmenté de moitié pour le pétrole, doublé pour l’électricité et le dioxyde de carbone et triplé pour le gaz. Une augmentation liée à la surchauffe causée par le redémarrage de l’économie mondiale après l’arrêt de celle-ci dû à la pandémie.

Ces augmentations mettent les banques centrales face à un dilemme : laisser filer la hausse des prix, ou bien agir plus tôt que prévu, en resserrant leur politique monétaire ? L’inflation en Europe qui ressort par exemple à +3.4% en Septembre est majoritairement influencée par la hausse de l’énergie qui à elle seule comptabilise une inflation annuelle de 17.4%. Les différentes banques centrales considèrent toujours que ces éléments sont transitoires mais il conviendra de suivre de très près leurs allocutions dans les prochains mois.

Même si l’inflation est galopante, elle pourrait limiter l’action des banques centrales car la hausse des prix de l’énergie vient rendre vacillante la croissance mondiale. On peut notamment noter les évènements récents :

  • En Chine, les suspensions d’approvisionnement en électricité ont déjà frappé ces derniers mois presque la moitié de l’industrie chinoise.
  • La forte demande de carburant, liée à la reprise économique et du trafic aérien et routier, et une offre limitée expliquent l’appréciation de l’or noir (WTI) qui dépasse son plus haut niveau depuis 7 ans (à environ 80 USD le baril). L’OPEP a donc décidé d’augmenter la production mensuelle seulement de 400 000 barils par jour, malgré une demande importante créant même des pénuries dans certaines régions. L’OPEP attend encore pour augmenter sa production par crainte de revivre le scénario de 2020. (demande inexistante et offre à stocker).
  • Les États sont obligés de mettre en place des boucliers tarifaires face à l’augmentation du prix du gaz pour éviter une perte de pouvoir d’achat des ménages trop importante. C’est l’exemple de la France, avec la prise de parole de Jean Castex : « L’augmentation du gaz de 12,6% le 1er octobre sera la dernière ». Le prix du gaz TTC sera donc bloqué jusqu’en avril 2022.

Le futur amènera à revivre un scénario où le prix des matières premières augmentent, mais cette fois-ci à travers la hausse des énergies vertes. L’Union européenne s’est fixé un objectif ambitieux de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre avec notamment l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Cela revient à les diminuer chaque année de 3 %. Ainsi, des investissements colossaux seront nécessaires pour créer cette énergie. Si on ne doit citer qu’un chiffre, rien qu’en France dans le cadre du plan France Relance, 30mds € sur 100 mds € seront dédiés à la transition écologique. Cependant, à l’heure actuelle ces énergies vertes ne génèrent pas autant de rendement ce qui implique un coût supplémentaire pour un rendement équivalent.

A l’heure actuelle, l’impact de la hausse des matières premières aura donc des conséquences multiples et augmentent le scénario d’une économie en stagflation : économie en décélération avec une inflation forte, scénario rendant l’exercice des banques centrales encore plus complexe.

* Les Echos, 08/03/2018

 

Foodtech & Agrotech au chevet de la sécurité alimentaire mondiale

La pandémie a accentué dans la conscience collective la nécessité de faire de la transition écologique un enjeu majeur pour le 21ème siècle pour éviter toutes les conséquences désastreuses du réchauffement climatique.

L’une des conséquences majeures du réchauffement sera l’impact sur la sécurité alimentaire de ses habitants. Planète, qui abritera à horizon 2050 près de 10 milliards d’individu.
Il est évident que la qualité de la production agricole mondiale est liée aux conditions météorologiques. Nous voyons déjà les effets du dérèglements climatiques avec notamment des études récentes du GIEC qui pointent la baisse d’1⁄5 de la productivité agricole sur les 50 dernières années. Mais les conséquences futures sont tout aussi inquiétantes, L’IPCC est très claire sur les conséquences du réchauffement climatique futur qui entraîneront des évènements climatiques extrêmes qui à leur tour entraîneront des impacts sur la production agricole mondiale.

Au-delà des mesures pour lutter contre le réchauffement climatique, certaines entreprises du monde de la Foodtech et Agrotech font preuve d’innovations pour proposer des alternatives moins impactantes sur le plan écologique. Ces entreprises seront clés pour rendre la chaîne d’approvisionnement alimentaire plus efficiente et moins impactante écologiquement. Au sein de ce secteur, plusieurs sous secteurs très intéressants devraient présenter de forte croissance dans les prochaines années.

On peut noter l’ensemble des sociétés qui travaillent sur les “viandes végétales” qui parient sur l’impact environnemental de la production de viande, de la conscience collective sur le bien-être animal et sur l’impact sur la santé de la consommation de viande notamment rouge. Des sociétés comme Beyond Meat ont fait leur introduction en bourse en 2019 et sont valorisées aujourd’hui 6.5 mds USD. C’est un secteur en pleine croissance qui pourrait dans les prochaines années proposer des viandes et poissons de synthèse développées en laboratoire à des prix grand publics (aujourd’hui, les solutions sont trop coûteuses pour être développées à grande échelle). Aujourd’hui plus de 70 sociétés technologiques travaillent sur ce sujet d’après Bloomberg, il est estimé que ce type de viande représentera 35% de la consommation mondiale d’ici 2040.

Mais il restera tout de même le challenge de produire mieux avec moins. Une des solutions proposées par l’Agrotech est d’arrêter de produire horizontalement mais verticalement : on construit des plateaux de plantations comme des immeubles. Les plantes sont contenues dans des cuves où la plante a tout le nécessaire pour grandir grâce notamment à des LEDs pour continuer à pouvoir effectuer le processus de photosynthèse. Cette solution permet notamment de réduire les besoins en eau (circuit court), de rapprocher la production du consommateur grâce au gain d’espace dans les villes et d’augmenter grandement le rendement. Pour l’instant, quelques sociétés de l’Agrotech travaillent pour démocratiser cette solution qui semble évidente sur le papier mais sa problématique actuelle réside encore sur le coût de construction des fermes verticales. La société française Agricool est notamment l’une des start-up qui développent ces solutions dans des containers proche de Paris et proposent par la suite ses produits dans des supermarchés français.

La technologie sera donc une partie de la réponse à l’insécurité alimentaire future. Mais l’un des enjeux majeurs n’est pas forcément de trouver des alternatives tout de suite mais surtout d’optimiser notre consommation actuelle. D’après l’organisation des Nations Unis environ 33% de la production actuelle est perdue ou gaspillée.

 

Auteurs des articles : Sandrine Genet, Cédric Genet, Yohann Derbyshire & Alioune Niang.

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