Brèves
La France change de visage
La période électorale 2017 aura ouvert en France un renouvellement politique jamais vu sous la 5ème République. Ce n’est pas un parti politique qui a gagné ; le Président de la République a moins de 40 ans, et 74% des députés élus le sont pour la première fois.
Y a-t-il un risque lié à ce manque d’expérience ? Ou faut-il y voir une chance, et l’espoir d’une évolution de la société française, jusque-là si conservatrice ?
Seule certitude les chantiers annoncés sont nombreux et d’importance.
Réforme du Code du Travail, suppression du RSI, modification des modalités d’application du CICE (Crédit D’Impôt pour la Compétitivité et la Croissance) pour généralisation des baisses de charges, refonte de la taxe d’habitation, hausse de la CSG sur les retraites, réforme de l’ISF…
Il est difficile à ce jour de prévoir les impacts liés aux projets du Président Macron. Les français ont signé un blanc-seing au président, mais désormais, il faut agir et vite.
Le calendrier n’est pas fixé et chaque jour une nouvelle annonce de report vient perturber la lecture.
Emmanuel Macron a été nettement soutenu par le milieu des affaires et de l’entreprenariat en général avec le souhait que soit fixé un cap clair et, selon son expression, « une feuille de route ». Il est désormais indispensable que celle-ci soit fixée très vite car beaucoup s’impatientent déjà. On ne connait à ce stade que de grandes lignes, et rien n’est assez précis pour prendre des décisions dans le cadre de la gestion du patrimoine d’un particulier, ou d’investissements pour une entreprise. Cela va générer de l’attentisme qui n’est jamais profitable à une économie.
Les investisseurs étrangers ne s’y trompent pas. Malgré les rumeurs sur les profits que Paris pourrait tirer des difficultés de Londres, malgré la perspective d’une situation plus favorable pour les entreprises en France, depuis l’élection, aucun mouvement d’investissement étrangers ne s’est déployé en France.
Brexit, les premiers effets négatifs
Il y a un an, les Britanniques votaient pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne. Alors que Londres et Bruxelles commencent à négocier, l’économie s’impose comme un enjeu majeur.
De fait, si la sortie n’est pas encore actée, plusieurs indicateurs permettent de constater un ralentissement de l’économie britannique.
En effet, sur le premier trimestre de cette année, la croissance a augmenté de 0,2%, contre 0,7% au quatrième trimestre 2016. Avec ce chiffre, le Royaume-Uni se place ainsi en queue de peloton des pays du G7 sur cette période, derrière la France.
Depuis le 23 juin 2016, date du référendum sur la sortie de l’Union Européenne, la livre sterling a perdu 14% de sa valeur face à l’euro. En six mois, elle avait perdu 20% face au dollar.
En conséquence, le prix des importations augmente, ce qui se répercute irrémédiablement sur les prix des biens de consommation, et l’inflation ne cesse de croître.
Cela explique en grande partie la baisse du pouvoir d’achat des Anglais et donc une baisse de la consommation.
En revanche, les touristes étrangers sont privilégiés. En 2016, le Royaume-Uni a ainsi accueilli 37,6 millions de touristes. Un record. Leurs dépenses sont évaluées à 26 milliards d’euros par l’ONS.
Le monde des affaires, lui, ne semble pas épargné par les difficultés.
Selon une étude de l’Université de East Anglia, les fusions-acquisitions auraient diminué de 15% depuis le référendum sur la sortie de l’UE, soit 60 fusions par mois.
Le taux de chômage est l’un des seuls indicateurs qui semblent hermétiques au Brexit. A la fin du mois d’avril, il s’est établi à 4,6% de la population active. Du jamais-vu en quarante- deux ans.
Sur la période de février à avril, le pays comptait ainsi 1,53 million de chômeurs. Cela représente
145.000 personnes de moins que l’année précédente.
L’absence d’impact du Brexit sur le marché de l’emploi est en partie attribuée à la hausse du nombre de travailleurs indépendants, à 4,78 millions de personnes à fin mars, contre 4,69 millions l’année passée sur la même période. Ils représentent désormais 15% des actifs.
Pendant ce temps-là… le monde change
Le nettoyage du secteur bancaire européen se poursuit. Quelques jours après le rachat ordonné de Banco Popular par sa compatriote Santander, sous l’égide de la BCE, l’Union Européenne a validé ce week-end les mesures proposées pour liquider les établissements italiens BPVI et Veneto Banca. L’Etat italien a mandaté Intesa Sanpaolo pour procéder aux opérations. Rome injectera 4,78 milliards d’euros dans ce projet de reprise et apportera jusqu’à 12 milliards d’euros de garanties à Intesa Sanpaolo.
L’Europe a un nouveau cap. Fixé à horizon 2027, le nouvel élan impulsé par Emmanuel Macron et Angela Merkel marque une rupture nette avec les mandatures précédentes. L’horizon à 10 ans en dit long sur l’ampleur du chantier.
Perspectives économiques et financières
La grosse déception vient des Etats-Unis car la croissance reste stabilisée à des taux trop bas (environ 2% annuel) et l’économie ne repart pas, malgré un taux de chômage très faible et une politique expansionniste, tant au niveau monétaire qu’économique.
De ce fait, le scénario économique de forte croissance et de potentielle hausse des prix s’éloigne pour faire place au scénario que les Etats-Unis connaissent déjà depuis plusieurs années, à savoir une croissance limitée, une flexibilité totale du monde du travail et une stabilité des prix.
Dans ce contexte, la Banque Centrale Américaine n’a pas d’autre choix que de limiter les hausses de taux et reste contrainte à une politique accommodante malgré ce qu’elle avait annoncé.
Reste à savoir si la politique fiscale que souhaite modifier le président Trump trouvera grâce auprès du Congrès. Si cette politique devait être acceptée, l’effet sur l’économie serait alors immédiatement très positif, même si à plus long terme, c’est un nouvel amoncellement de dettes pour l’Etat Fédéral américain.
Face à l’incertitude des agissements de la Banque Centrale Américaine, la Banque Centrale Européenne peut se retrouver en situation délicate.
Il n’y aura aucune évolution de sa politique avant les élections allemandes (prévues en septembre, et dont la victoire semble promise à Angela Merkel).
La question est de savoir si Mario Draghi pourra modifier sa politique après ces élections pour accompagner le mouvement de croissance en Europe, ou s’il sera bloqué par une politique monétaire agressive de l’autre côté de l’Atlantique.
En effet, si la Banque Centrale Américaine reste accommodante et que la Banque Centrale Européenne doit devenir plus restrictive, l’effet sur l’euro serait immédiat et pousserait vers un euro fort dont personne en Europe ne pourrait réellement se satisfaire.
Cette configuration contraignant au maintien des taux bas est un bon scénario pour les actifs risqués comme les actions.
En Chine, tout se poursuit comme une longue promenade paisible sur le chemin de la prospérité.
Le gouvernement a accentué ses investissements pour le plan « Made in China 2025 », qui a pour objectif de faire de la Chine le premier producteur au monde de produits de qualité.
La seule surprise économique du second trimestre est venue de la chute des cours du pétrole, qui se négocie désormais sur des zones proches des niveaux d’inquiétudes pour les grands pays producteurs.
Au-delà de la baisse du pétrole, l’inflation qui revenait progressivement depuis mi 2016, s’est stabilisée.
Sur le plan des monnaies, le dollar se déprécie doucement face à toutes les autres sous l’effet d’une amélioration économique dans toutes les zones du monde, plus significative qu’aux Etats-Unis.
Les pays émergents continuent de profiter d’une part de la dépréciation du dollar mais souffrent désormais, pour certains, de la baisse du pétrole. Leur vigueur ne devrait cependant pas faiblir sur les prochains mois, ces pays profitant du retour des capitaux d’investisseurs étrangers, mais aussi d’une stabilité politique qui s’améliore et des réformes structurelles qui se mettent en place.
Nos convictions
Il est nécessaire de diversifier pour éviter d’être pris à contre-pied par la réalisation de l’un ou l’autre des scenarii qui prédominent : soit reprise de l’inflation et sursaut de croissance, soit maintien d’une croissance molle et de taux bas.
Nos stratégies principales :
- Les stratégies de primes de risques continuent d’apporter des résultats satisfaisants et paraissent idéales dans la situation pour un niveau de risque faible.
- Les stratégies obligataires à très courtes maturités, afin d’éviter de trop fortes remontées de taux, dans les entreprises européennes.
- Nous renforçons les stratégies obligataires sur les entreprises européennes dites High-Yield, c’est-à- dire de moyennes à petites tailles avec des maturités à 3 – 4 ans de durée de l’obligation.
- Les stratégies obligataires dans les pays émergents en privilégiant des emprunts obligataires libellés en dollar, plutôt que dans les monnaies locales, dont les mouvements sont parfois difficiles à anticiper.
- Les investissements sous forme de prêts dans les sociétés non cotées, sous format FCPR ou FCPI idéalement.
Les stratégies plus offensives, qu’il nous paraît nécessaire de maintenir, renforcer ou initier sont les suivantes :
- Les actions de petites et moyennes entreprises en Europe. Les actions européennes en général mais en réduisant quelque peu les expositions sur les secteurs banques, qui ont déjà beaucoup bénéficié du rebond des marchés. Nous pensons qu’il est nécessaire de supprimer les lignes sur les secteurs de l’énergie. À l’inverse, nous renforçons les positions sur les secteurs technologiques en général.
- Les actions émergentes de Chine, notamment le secteur de la consommation interne. L’Inde, le Brésil et de manière plus limitée, la Russie, doivent revenir progressivement dans cette partie de vos portefeuilles.
- Les matières premières et plus particulièrement les valeurs minières (Cuivre, Fer…) qui bénéficieront de la reprise de l’activité manufacturière et de la hausse des prix.
- Nous pensons qu’il faut réduire le niveau d’exposition aux marchés américains, à part peut-être pour quelques valeurs de l’économie digitale qui semblent ne pouvoir que progresser, surtout après la correction de ce mois de juin.
- Sur les marchés des changes, comme évoqué précédemment, la baisse du dollar devrait se stabiliser. Ainsi, nous pensons qu’il est nécessaire de rééquilibrer les positions monétaires sur le dollar pour les investissements dans les pays émergents.
- Les atermoiements britanniques ont ouvert une nouvelle fenêtre pour des achats de la livre sterling qui n’en finit plus de baisser.
- Enfin, sauf achat par endettement, nous souhaitons rester à l’écart des produits de type SCPI ou OPCI car nous jugeons que les actifs actuellement achetés en France par ces véhicules d’investissement sont trop chers
Focus
Vague d’investissement dans le secteur technologiques
Les fonds souverains ont effectué une transaction sur trois dans le secteur de la technologie au premier trimestre. Ils investissent à long terme pour des transferts d’innovation et diversifier leurs économies.
En retard, ils ont accéléré la cadence sur les industries et services de demain. Un enthousiasme à peine tempéré par la bulle des valeurs technologiques et du Nasdaq, car ils y investissent à long terme. C’est un moyen pour certains d’entre eux de préparer leur pays à « l’après pétrole » (Arabie Saoudite) , de diversifier leurs économies, ou encore de bénéficier de transferts de savoir-faire de la part des industries à la pointe de l’innovation (Singapour).
Que ce soit sur des groupes déjà bien établis ou des jeunes pousses, les fonds qui en ont les capacités ne s’interdisent aucun type de placement.
Le fonds Temasek, historiquement très actif dans ces industries de pointe, a acheté cette année pour 800 millions de dollars la société Verily Life Sciences, qui opère dans le secteur des nouvelles technologies de la santé, et qui appartenait au groupe Alphabet (Google). GIC, le deuxième principal fonds de Singapour, a investi en février dans la société Advanced Leading Technology, qui opère dans les composants électroniques pour les véhicules.
En 2016, les fonds souverains avaient investi 13 milliards de dollars dans les groupes de technologie. Le fonds de l’Arabie Saoudite avait alors misé 3,5 milliards de dollars sur le groupe Uber. Pour 2017, c’est un volume de 100 milliards de dollars qui est dédié exclusivement à la technologie.
Au premier trimestre 2017, les fonds souverains ont réalisé 53 investissements stratégiques pour un montant de 14,9 milliards de dollars.
La taille moyenne d’une transaction n’a été que 340 millions de dollars, reflétant la prudence des fonds en début d’année. Les secteurs fétiches des fonds (immobilier, infrastructures, services aux collectivités), dans lesquels ils investissent de manière structurelle, ont représenté 30% de leurs investissements totaux que ce soit en nombre de transactions ou en valeur. En revanche, l’énergie et les banques ont globalement perdu de leur attrait.
Les fonds ont également évité d’investir en Europe, compte tenu des incertitudes politiques (élections) et économiques qui existaient alors.
Avec 22% des investissements , les Etats-Unis sont apparus bien plus prometteurs grâce notamment à ses
« pépites » dans la technologie.
Le report du prélèvement à la source modifie les stratégies
Ce report remet en cause certaines stratégies que nous avons pu mettre en place face à l’année de transition.
Les versements sur un PERP en 2017
Avec la prévision du prélèvement à la source au 1er janvier 2018, de nombreux contribuables ont suspendu leurs versements programmés. Cependant le report du prélèvement à la source au 1er janvier 2019 reporterait également l’année de transition de 2017 à 2018. 2017 serait donc comme 2016 et les années précédentes. Nous encourageons donc les contribuables à reprendre leurs versements selon leur situation.
Les travaux des biens locatifs
Afin de contrer les tentations de certains contribuables de décaler les travaux des biens locatifs sur 2018 compte tenu de « l’année blanche » 2017, et dans le but de ne pas perturber l’activité dans le secteur du bâtiment, la loi avait prévu certaines mesures particulières en ce qui concerne les charges foncières.
Sauf exceptions, les dépenses de réparation, d’entretien et d’amélioration payées en 2017 et 2018 devaient être déductibles en 2018 à hauteur de la moyenne des montants respectivement supportés en 2017 et 2018. Ainsi, nous préconisions d’attendre 2019 pour réaliser des travaux.
Dans le cadre du report du prélèvement à la source, nous recommandons de réaliser les travaux avant le 31 décembre 2017. Ainsi, les dépenses réalisées ne devraient pas subir les mesures exceptionnelles et ne perdraient pas leur déductibilité à 100%.
Les réductions et crédits d’impôts
Il avait été annoncé que les réductions et crédits d’impôt – qui agissent donc directement sur le montant de l’impôt, et non pas sur le revenu imposable – devaient être maintenus et qu’ils seraient intégralement versés au moment du solde de l’impôt à la fin de l’été 2018. Cette mesure permettait à certains contribuables de profiter d’opportunités.
À titre d’exemple, les investissements en Girardin Industriel, compte tenu de ces mesures, permettaient en réalité un « placement de trésorerie » à court terme à haut rendement, puisque le contribuable devait récupérer la réduction d’impôt (115 à 120% du montant investi) à l’été 2018 au titre de son investissement réalisé en 2017.
Le report du prélèvement à la source vient contrer cette stratégie de « placement de trésorerie ».
Toutefois l’efficacité de l’investissement Girardin reste la même.
La rémunération des chefs d’entreprise
Nous avons pu conseiller à certains, dans des cas particuliers, d’ajuster la rémunération en 2017 en fonction des années précédentes. L’année 2017 redevenant une année « normale », cette stratégie ne tient plus.
Toutefois, nous vous conseillons de ne pas réduire votre rémunération 2017 afin de pouvoir optimiser 2018