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Bulletin N°44 – Mars-Avril 2018

par Cedric Genet

Bulletin N°44 – Mars-Avril 2018

Brèves

À qui appartient la dette française ?

Certains dirigeants politiques nationalistes en ont rêvé : renationaliser la dette française. Quelques- uns souhaiteraient même que la Banque de France puisse directement acheter les titres émis par l’Etat, une pratique strictement interdite dans la zone euro. Or, d’après les dernières statistiques de l’institution monétaire, celle-ci est probablement le plus gros créancier de l’Etat et son poids s’est encore très nettement accru.

Alors que sa part était inférieure à 5% fin 2014, la Banque de France détient près de 20% de la dette négociable de l’Etat, qui s’élève au global à 1.700 milliards d’euros.

Ce phénomène n’est évidemment pas une entorse aux traités européens. Il reflète les mesures exceptionnelles mises en place par la Banque Centrale Européenne (BCE) en mars 2015 pour lutter contre le risque de déflation. La BCE a lancé un vaste programme d’achat de dette publique de la zone euro. Dans ce cadre, c’est chaque banque nationale, donc la Banque de France chez nous, qui est chargée d’acquérir les titres français.

Les interventions massives de la Banque de France ont complètement modifié la répartition entre détenteurs étrangers et détenteurs français de la dette d’Etat

La part des premiers est au plus bas depuis au moins fin 2009 : les investisseurs non-résidents détenaient alors 67,8% du papier d’Etat. Ils ne pèsent plus que 53% à fin 2017.

Les investisseurs étrangers ne boudent pas pour autant la dette tricolore. C’est même le contraire, et c’est notamment une des raisons pour lesquelles les taux ne remontent pas. Alors qu’il avait atteint 1% en février, le taux français à 10 ans est redescendu à 0,75% sous l’effet d’achat massif étranger.

Les derniers chiffres de la Banque de France montrent également que la France – Administrations et Etat, entreprises et banques – est le premier emprunteur de la zone euro, avec une part d’achat de 32% des titres émis en 2017.

La part de cet investisseur exceptionnel, qu’est la Banque de France, diminuera lentement lorsque le programme de la BCE s’arrêtera ; sans doute à la fin de cette année. L’arrêt de ce programme provoquera forcément une remontée des investisseurs étrangers dans la part détenue de la dette française, qui ne cesse de se renouveler.

En 2018, la France va emprunter 195 milliards d’euros : un record.

L’économie française subit les grèves

Dès la seconde semaine du mouvement, la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) avait tiré le signal d’alarme, indiquant que les conséquences de ce mouvement social commençaient à se faire sentir.

Certains secteurs sont particulièrement impactés par le mouvement social en cours.

L’hôtellerie et le tourisme apparaissent déjà touchés par les mouvements à la SNCF et à Air France. L’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH) observe un ralentissement de l’activité, alors que le secteur recommençait à croître. La perte d’activité atteindrait déjà 10% à 20% selon les régions, et l’inquiétude grandit pour le mois de mai, historiquement assez fort du fait des ponts.

Les entreprises qui utilisent le fret SNCF sont aussi affectées. L’Association des Usagers du Transport de Fret (AUTF) estime le coût de deux mois de grève à la SNCF à 1 milliard d’euros. Il est cependant probable qu’une partie du fret se reporte vers le transport routier de marchandises pour éviter les goulots d’étranglement. Il est aussi possible que le choix d’une grève de deux jours tous les cinq jours ait un effet moindre qu’un mouvement continu, notamment en ce qui concerne l’activité des entreprises.

Chez Air France, on estime que les deux premiers jours de grève ont déjà couté 170 millions d’euros à la compagnie, soit plus de 10% du résultat de l’année 2017 : un gouffre pour une compagnie qui essaie de se structurer pour affronter les enjeux de demain.

L’impact d’une grève est habituellement limité dans le temps, et, souvent, un rattrapage s’opère dans les mois qui suivent l’arrêt du mouvement, selon l’Insee.

En 1995, la croissance au quatrième trimestre avait été amputée de 0,2 point pour atteindre 0,1%. Mais l’activité avait rebondi de 0,7% sur les trois premiers mois de 1996.

De même, en 2003, le PIB avait chuté de 0,2% au deuxième trimestre, les grèves ayant compté pour 0,1 point dans ce recul, l’activité économique avait repris le trimestre suivant, bondissant, là encore de 0,7%.

Il existe toutefois un impact qui ne peut être chiffré très précisément : celui de l’image de la France à l’étranger. Celle-ci s’est nettement améliorée depuis un an et les investisseurs étrangers affluent en France, il serait donc dommage de casser cette belle dynamique.

Pendant ce temps-là… le monde change

Les crédits immobiliers restent au plus bas. La crainte de hausse des taux annoncée en février ne se matérialise pas. Toujours pas d’inflation, des taux directeurs que la banque centrale conserve très bas, et des banques qui ne cherchent pas encore à accroitre leur marge, font que le taux moyen observé reste inférieur à 1,5%. Il est donc toujours temps de renégocier son taux en même temps que son assurance de prêt désormais négociable chaque année.

Reconnaissance faciale, assistant intelligent, voiture autonome… L’intelligence artificielle est partout et avance à une vitesse vertigineuse. Des systèmes sont déjà en capacité d’interpréter nos scanners médicaux avec un diagnostic et un compte rendu dignes des plus grands spécialistes. D’autres sont déjà capables de prononcer un jugement dans le cadre d’une procédure simple.

L’automatisation est partout : une source d’investissement à ne pas négliger.

Perspectives économiques et financières

La chute des marchés financiers en février, le stress de mars : tout cela semble désormais oublié. Les fondamentaux auraient repris le dessus sur la peur, mais pour combien de temps ?

Si les indicateurs économiques restent globalement positivement orientés, il semble qu’à nouveau l’Europe ralentisse après avoir connu son pic de croissance fin 2017. C’est à la fois une surprise et globalement une très mauvaise nouvelle pour tous les européens. Au cours de la dernière décennie l’Europe a pris du retard dans tous les domaines, et le retour d’une croissance forte en 2017 pouvait augurer d’une période de rattrapage au cours des trimestres à venir. Mais le soufflé semble vite retombé.

Ces mauvaises nouvelles sont la combinaison de plusieurs facteurs.
D’une part, les effets de la politique accommodante de la BCE commencent à s’estomper, et cela s’aggravera avec la réduction du programme d’achat de la BCE. D’autre part, malgré un taux de chômage encore élevé (8,6%), les secteurs dynamiques, porteurs de la croissance, commencent à souffrir de réelles difficultés à trouver de la main d’œuvre ; le manque de qualification d’une partie de la population étant actuellement un vrai frein au développement.

Aux Etats-Unis, c’est l’inverse. Les politiques expansionnistes et dépensières de Donald Trump portent leurs fruits. La consommation continue de croître et les bénéfices des entreprises sont révisés à la hausse. Cette politique endette les Etats-Unis de manière abyssale et posera des difficultés importantes à moyen terme, mais à court terme, c’est un coup de fouet bienvenu pour l’économie américaine.

La Chine se moque des tensions commerciales et affiche encore 6,8% de croissance pour le premier trimestre 2018 : exportations, activités immobilières, consommation interne : tout fonctionne parfaitement au pays de Xi Jinping, le tout puissant président chinois.

Malgré les tensions des derniers mois, l’or est resté à un niveau stable, s’approchant toutefois de 1 350 $ l’once, qui est un seuil d’achat. Nous restons donc attentifs à l’évolution du métal jaune.

L’or noir, de son coté, est à un niveau idéal pour l’économie, ni trop cher pour les consommateurs, ni trop faible pour les producteurs. Tout le monde semble avoir trouvé son compte sur ce sujet, et plus personne ne s’inquiète de son évolution. Toutefois, comme toujours, il pourrait bien être un déclencheur de stress, et le seuil des 80 $ est à surveiller.

Nos convictions

L’amélioration des perspectives économiques mondiales se poursuit, même si l’Europe semble être la future zone décevante et qu’il sera important d’essayer d’anticiper les évolutions des règles commerciales

Pour les stratégies actions, nous continuons de faire évoluer les portefeuilles selon les choix que nous avons initié en décembre et accentué en mars : mondiales en cas de protectionnisme forcené. Nous réduisons la poche des actions de petites et

Le constat au niveau de la valeur des actions est assez clair. Les actions américaines sont très chères, mais les bénéfices des entreprises continuent d’augmenter alors que les actions européennes sont peu chères, mais les révisions des bénéfices se font à la baisse.

Nos stratégies principales ont peu évolué sur la partie obligataire mais ont changé sur la partie actions :

Zéro obligation d’Etat ou de grandes entreprises européennes ou américaines.

Nous recommandons d’investir sur des stratégies obligataires qui sont en capacité de prendre des positions dites de sensibilité négative, c’est-à-dire des solutions qui profiteraient de la hausse des taux. Toutefois, nous réduisons cette partie.

  • Nous poursuivons l’investissement sur des stratégies d’obligations convertibles européennes ou obligations indexées sur l’inflation.
  • Nous maintenons les stratégies obligataires sur les entreprises européennes dites « High-Yield », c’est-à-dire de moyennes à petites tailles, avec des maturités à 3 à 4 ans de durée de l’obligation ; ces maturités courtes étant moins sensibles à une hausse des taux.
  • Les stratégies obligataires dans les pays émergents libellés en dollar restent une conviction forte pour dynamiser quelque peu ce compartiment obligataire. Nous intégrons actuellement des obligations des pays émergents libellées en monnaie locale de certains pays.

Pour les stratégies actions, nous continuons de faire évoluer les portefeuilles selon les choix que nous avons initié en décembre et accentué en mars :

Nous réduisons la poche d’actions européennes en général, tout en conservant les positions sur des secteurs comme la banque, l’assurance, l’énergie ou la consommation des pays émergents que certaines valeurs savent capter. Nous avons coupé les stratégies dans le secteur de l’immobilier coté, sur lesquelles nous avions de fortes positions depuis 2015.

Nous réduisons la poche des actions de petites et moyennes entreprises en Europe au profit de petites sociétés mondiales. Il convient d’être très sélectif et de se prémunir contre un risque de liquidité.

  • Les actions émergentes de Chine, et généralement d’Asie du Sud-Est, notamment le secteur de la consommation interne, et tout particulièrement de la technologie, restent des zones prioritaires. La Russie reste à renforcer malgré les risques politiques. Nous restons à l’écart du Brésil et de l’Inde.
    En début d’année, nous avons fait le choix d’investir aux Etats-Unis uniquement dans le secteur technologique. Ce fut une erreur. Pourtant, nous maintenons cette conviction sur l’économie digitale et nous pensons que c’est un secteur à renforcer.
  • Nous avons initié des positions sur l’or, mais restons à l’écart des matières premières en général. La zone de change Euro-Dollar est stabilisée. Nous ne prenons aucun pari sur l’évolution de cette parité.

Focus

La guerre commerciale

Début Mars, avec la création d’une taxe de droits de douanes de 25% sur les importations d’acier, Donald Trump a surpris la planète du libre-échange.

Le problème est nettement plus complexe et plus profond que ce seul sujet de l’acier. En effet, cette taxe sur l’acier, si elle avait dû s’appliquer totalement, n’aurait eu qu’un effet très limité.

Si Trump a été taxé de président passéiste, nous pensons au contraire qu’il faut y voir un mouvement visionnaire. En effet, ce n’est pas le sujet de l’acier qui se joue ici, mais bien une redéfinition de la carte du commerce mondial, dont les Etats-Unis souhaitent redevenir les maîtres, usant de leur puissance économique et politique.

La méthode est évidemment critiquable et pour le moins étonnante, mais finalement, c’est la méthode du négociateur viril qui s’assoit et commence par casser la table des négociations, avant de dire « maintenant on peut discuter » : méthode Trump !

C’est exactement ce qu’il a fait, puisqu’il a fini par exonérer l’Union Européenne de cette taxe, puis le Japon. Sa cible est donc la Chine. Elle ne s’y est pas trompée, répliquant avec une mise en place de taxations douanières de 128 produits en provenance des USA, et en saisissant la commission des litiges de l’OMC.

La Chine a pris une place incroyable dans le commerce mondial et tout cela s’est encore accéléré avec son plein accès au marché mondial au sein de l’OMC en 2013.

Mais surtout, la Chine a progressivement absorbé le savoir-faire mondial dans tous les secteurs. C’est ce transfert de propriété intellectuelle auquel Trump s’attaque, et l’Europe ferait bien de s’en inspirer. Construire des Airbus en Chine, soit, mais transférer la propriété intellectuelle qui permettra à la Chine de développer ses propres avions, on comprend moins.

La Chine pourrait-elle souffrir de ces décisions américaines ? Il est fort à parier que non, tant le développement de sa consommation interne et les exportations vers les autres pays sont un moteur largement suffisant pour maintenir sa croissance.

Le monde a changé, et, cette fois-ci, les Etats-Unis seuls seront bien peu de choses pour contraindre l’économie chinoise à ne pas se développer sur la base de technologies qu’Européens et Américains lui ont généreusement livrées.

La déclaration 2018 des revenus 2017 est ouverte !

L’administration a publié les informations relatives à la campagne déclarative de l’impôt sur le revenu.
Dans le cas d’une déclaration en ligne, les usagers reçoivent un courriel les informant que le service est accessible depuis le 11 avril 2018. Ce mode de déclaration permet toujours de bénéficier d’un report de la date limite de déclaration ; celle-ci dépend du département de résidence et a toujours minuit pour échéance horaire :

  • Départements n°01 à 19 : 22 mai
  • Départements n°20 à 49 : 29 mai
  • Départements n°50 à 974/976 : 5 juin
  • Non-résidents : 22 mai

Par ailleurs, cette campagne de déclaration verra la mise en application de l’Impôt sur la Fortune Immobilière en remplacement de l’Impôt de Solidarité sur la Fortune. Désormais, si vous êtes redevable de l’IFI, celui-ci se déclare de façon détaillée avec la déclaration de revenus, quelle que soit la valeur du patrimoine taxable. Plusieurs cas de figure sont envisageables :

  • Dépôt d’une déclaration ISF en 2017 :
    • Déclaration papier : elle sera envoyée par pli séparé de la déclaration de revenus
    • Déclaration en ligne : la rubrique IFI est automatiquement proposée
  • Nouveau déclarant IFI :
    • Déclaration papier : possibilité de télécharger le formulaire n° 2042-IFI sur le site http://www.impots.gouv.fr ou directement dans votre centre des Finances Publiques
    • Déclaration en ligne : directement sur votre espace

Enfin, il est important de préciser que le prélèvement à la source s’appliquera à partir du 1er janvier 2019, ce qui implique une déclaration des revenus 2017 et un paiement de l’impôt en 2018 identiques aux années précédentes. Cette déclaration permettra tout de même d’anticiper le prélèvement à la source, puisqu’elle emportera les conséquences suivantes :

  • Pour les revenus soumis aux acomptes (revenus fonciers, BIC, BNC, BA) :
    • Connaître la nature et le montant des acomptes qui seront prélevés
    • Possibilité d’opter pour un prélèvement trimestriel et non mensuel
  • Pour les salaires :
    • Connaître son taux personnalisé : taux de prélèvement à la source du foyer
    • Possibilité d’opter pour le taux non personnalisé : afin de ne pas transmettre son taux personnel à son employeur

Il sera également possible d’opter pour un taux personnalisé individuel pour prendre en compte la différence de revenu au sein du couple, sans modifier le montant de l’impôt dû.

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