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Bulletin N°25 – Novembre-Décembre 2014

par Cedric Genet

Bulletin N°25 – Novembre-Décembre 2014

Brèves

La Russie craque !

Face aux lourdes sanctions de la communauté internationale suite au conflit en Ukraine, les observateurs anticipaient des conséquences négatives à moyen terme pour l’économie russe. En effet, le coût de ces sanctions était estimé par le gouvernement russe à 32 milliards d’euros par an et nous attendions de ce fait une entrée de la Russie en récession en 2015. C’était cependant sans compter sur l’incroyable chute des  cours  du pétrole, de près de 50% en quelques mois,  qui coûtera près de 135 milliards d’euros à la Russie (soit plus de 9% du PIB) : une véritable catastrophe.

Face à de tels chiffres  il  faut  indiquer  que  le  PIB russe a été de 1 450 milliards d’euros  en 2013 et que les réserves de  change  du  pays  sont à la limite basse critique à 335 milliards d’euros. En d’autres termes, c’est tout simplement la solvabilité de la Russie qui est mise en cause aujourd’hui et si le défaut de paiement de la Grèce ou de l’Argentine avait fortement secoué le monde financier c’était une goutte d’eau face à l’onde de choc que représenterait le défaut de la Russie actuelle.

Le risque est réel aujourd’hui et les prochains jours seront déterminants pour juger de  la  capacité du gouvernement Russe et surtout de la banque centrale de Russie d’enrayer l’incroyable chute de leur monnaie, le rouble, et stabiliser leurs réserves de change. La stabilisation des cours du pétrole sera également nécessaire (lire focus 1 ci-après). Ce risque de défaillance est la raison principale de la forte baisse des marchés  actions  européens en cette mi-décembre, car les accords commerciaux des pays européens avec la Russie, notamment pour l’Allemagne, sont stratégiques pour bon nombre d’entreprises exportatrices. Les sanctions décrétées par les pays européens se retournent actuellement contre eux et le retour du boomerang est fulgurant.

Les ingrédients pour 2015

En cuisine, les plus grands chefs parviennent toujours, grâce à leur talent, à sublimer des ingrédients qui pourraient paraître indigestes pris séparément. C’est le défi qui attend bon nombre de responsables politiques et économiques en 2015. A ce jour, les principaux ingrédients sont  les suivants :

  • La fin de l’argent gratuit aux Etats-Unis (fin des Quantative Easing – création massive de monnaie) et hausse des taux en perspective ;
  • Le déploiement sans précédent d’injection de liquidités en Europe (Quantitave Easing à venir courant 1er trimestre 2015) et au Japon (poursuite de l’injection massive de Yen). Jamais, depuis la seconde guerre mondiale, nous n’avions connu de politiques si différentes entre les banques centrales des  grandes  zones  développées.  Face  à  cela,  la  volatilité  des  monnaies  les  unes par rapport aux autres, risque de devenir complètement illisible à court
  • La course folle de la dette des états : aucun pays n’ayant prévu de diminuer sa dette, pas même l’Espagne ou l’Italie qui étaient, depuis 2 ans, engagé sur cette voie. Comment pourrons- nous faire face à ces dettes si la hausse des taux prévisible aux Etats-Unis se répercute en Europe ? Les remèdes très douloureux qui nous avaient été annoncés en 2011 et qui nous ont été épargnés pourraient bien refaire
  • Le risque de déflation en Europe, accentué par la course folle à la baisse du baril du pétrole, que personne ne semble ni comprendre ni contrôler.
  • Le bénéfice par action des entreprises, qui depuis 5 ans maintenant a augmenté de manière parfois surprenante mais étonnamment régulière, et qui, pour la première fois depuis 2009, pourrait être revu à la baisse par certaines entreprises, signe que les marges s’érodent.
  • Enfin pour assaisonner le tout, les risques géopolitiques n’ont jamais été aussi nombreux et le risque sanitaire Ebola ne semble pas faiblir.

Pendant ce temps-là… le monde change

La Grèce se lance dans des élections présidentielles anticipées à un bien mauvais moment et le risque de voir la partie prônant la sortie de la Zone Euro prendre le pouvoir n’est pas exclu. Si le spectre d’une crise de la Zone Euro devait     à nouveau faire surface dans ce contexte, bien que de nombreux outils aient été mis en place  depuis 2011, la secousse serait  probablement  de courte durée mais sévère.

Le gouvernement français a signé une charte qui institue la non rétroactivité fiscale et sociale. Très concrètement, cela veut dire que les changements de fiscalité n’affecteront plus ni les exercices déjà clos, ni même les exercices ou les années en cours. Cette décision est actée et nous remplit  de joie.

Perspectives économiques et financières

Face à la liste des ingrédients détaillée ci-avant, il m’est difficile de vous dresser des perspectives économiques très optimistes. Les Etats-Unis confirment toutefois, mois après mois leur réelle reprise et bonne santé économique. Le taux de chômage est désormais inférieur à 5.8% et les créations d’emplois battent des records dans tous les secteurs. La baisse du pétrole apparaît inquiétante pour les exploitations de gaz et huile de schiste qui ont beaucoup contribué à la reprise économique, et qui ne resteront pas rentables avec un baril de pétrole inférieur à 60$. Mais la baisse du pétrole permet aussi de retrouver beaucoup de pouvoir d’achat (près de 350$ par américain) soit une manne financière conséquente qui va se retrouver dans l’économie américaine. Cependant les Etats-Unis, unique pays bien portant de l’économie mondiale, savent qu’ils ne pourront pas continuer à avancer tous seuls.

La Chine semble définitivement marquer le pas et même si sa croissance de près de 6.5% nous fait rêver, sa volonté et son besoin de changement de modèle économique tourné vers la consommation interne ne prend pas. Toutefois, le gouvernement est à la manœuvre et navigue entre la maîtrise de sa monnaie et l’injection régulière de liquidités sur des secteurs cibles : banques, constructions.

Au Japon, le premier ministre, Shinzo Abe, n’est pas parvenu à mettre en œuvre les réformes souhaitées après une création massive de Yen. Celle-ci a toutefois eu le mérite de provoquer une légère croissance, comme le pays n’en avait pas connue depuis 25 ans, mais insuffisante pour relancer la machine. Les mois à venir s’annoncent très compliqués. Seule la capacité exportatrice des grandes entreprises sort renforcée de cet épisode, ce qui est un bon point.

L’Europe n’a pas vraiment évoluée en 2014 : la dette a continué de croître, les déficits aussi, les politiques restent incrédules et Mario Draghi fait des tentatives infructueuses. Les bonnes nouvelles viennent de l’extérieur : forte baisse de l’euro et forte baisse du pétrole. Ces deux points seront profitables aux entreprises exportatrices et à celles qui fabriquent et/ou distribuent des produits de consommation en Europe.

Enfin, dans le monde émergent, si de bonnes nouvelles viennent de l’Inde, dont la croissance devrait être proche de celle de la Chine dans les deux années à venir, le reste des pays souffre et va continuer de souffrir de la chute des cours du pétrole : Russie, Brésil Moyen Orient, Nigéria et bien d’autres sont très dépendants de leur richesse en pétrole et il faudra rapidement que le baril rebondisse vers 70$ pour que tout cela retrouve son équilibre.

Nos convictions

Les regards inquiets se tournent tous vers le prix du baril de pétrole et la situation en Russie.

Nous n’imaginons pas un instant que le prix du baril puisse durablement baisser plus que sa position actuelle. Sans dire que le baril de pétrole reviendra à des niveaux connus en ce début 2014 il est probable qu’une période assez longue le stabilise entre 60 et 70$ le baril. A ce niveau de prix,  la Russie sera le pays producteur le plus en difficulté  et cela fait donc apparaître un risque de défaut du pays. Nous ne pouvons l’exclure totalement mais, à ce stade, rien ne justifierai de prendre des positions tenant compte de cet évènement éventuel. Au contraire, les marchés ont anticipé cela, et devraient rebondir dans les prochains jours, au fur et à mesure que la situation va se stabiliser.

Cette nouvelle donne devrait contribuer à un maintien du dollar par rapport à l’Euro. Après avoir fortement chuté, la parité Euro/Dollar devrait se stabiliser et il ne nous paraît plus utile de maintenir les positions qui nous ont permis de faire de bonnes performances en 2014. La banque centrale européenne  ne  pourra  pas  éviter  de  procéder très rapidement à son Quantitative Easing et cela contribuera mécaniquement à la hausse des actifs risqués au premier rang desquels le marché actions. En attendant cet évènement il faut rester prudent mais dès son annonce, les actions européennes seront probablement le marché au plus fort potentiel.

La baisse du pétrole conjuguée à la baisse de l’euro sont très positives pour la hausse de la consommation et des investissements en Europe et aux US. Cela devrait provoquer une légère remontée de l’inflation. Nous pensons que positionner une petite partie des portefeuilles en obligations indexées sur l’inflation est une bonne idée. Enfin, la baisse  du  pétrole  aura aussi un effet accélérateur sur la croissance en Asie du Sud-Est, Inde inclus (hors Chine et Japon)    et la croissance en Amérique Centrale tirée par les US et le Mexique. Les  opportunités  à  saisir  dans un contexte très changeant sont, comme toujours, nombreuses, mais il faut avancer avec prudence face au risque de défaut Russe.

Focus

La révolution énergétique

Les Etats-Unis sont devenus en 2014  le  premier  pays producteur de pétrole  au monde  grâce  à l’exploitation des gaz et huiles de schiste. Cette activité a pris un essor tel, en  l’espace  de  5  ans, que le pays est aujourd’hui presque totalement indépendant énergétiquement. Cet ruée vers l’or noir aux Etats-Unis a fortement contribué à la reprise économique du pays puisqu’elle a été le premier créateur d’emploi  pendant  de  nombreux  mois  à  tel point que les flux migratoires entre les Etats ont été   totalement   bouleversé   entre  2010   et  2014.

Durant cette période de développement, les prix du baril de pétrole ont peu évolué se stabilisant autour de 100$ depuis de nombreux mois. A ce prix l’exploitation des Gaz de schistes étaient particulièrement rentables. Mais pourquoi les prix du pétrole se sont-ils effondrés de près de la moitié depuis juin ? Est-ce le seul effet de la surproduction venant des Etats-Unis ? Est-ce une volonté des pays de l’OPEP qui seraient prêts à prendre le risque d’une baisse durable du prix du baril pour casser les productions américaines mais surtout russes, qui ne sont plus rentables à ce niveau de tarif ?

C’est probablement un peu tout   cela   à  la  fois mais aussi l’apaisement de certaines tensions géopolitiques au Moyen-Orient, l’accord trouvé entre la Russie et l’Inde d’une part et la Russie et la Chine d’autre part pour exploiter de nouveaux champs pétroliers en Russie…  mais  aussi   certainement  des  éléments  que  nous  ne  maitrisons  pas  encore.

Alors, sommes-nous entré dans une nouvelle ère avec un prix de baril de pétrole à moins de 70$ ? Probablement pas car à ce niveau de prix, nombre des  exploitations  de  pétrole  à  travers  le  monde ne sont plus rentables. Il est donc probable que certaines exploitations soient abandonnées, que la Russie réduise sa coopération avec ses pays amis (Inde et Chine) et qu’une fois cela effectué, l’OPEP réduise sa production pour faire remonter le baril. Mais cela prendra du temps et 1 à 2 ans seront probablement nécessaires pour retourner au-delà de 70$ le baril. En attendant le pétrole bas et  stabilisé sera globalement profitable  à  l’économie, si celui n’est pas trop bas. La zone entre 60 et 70$ serait idéale pour conforter  la  reprise  américaine  et   idéale  pour   l’Europe,   le   Japon   ou   la  Chine.

Hériter en France : combien ça coûte

Nous poursuivons notre série sur l’héritage avec ce deuxième volet consacré au  coût  des  successions. La loi en faveur  du travail,  de  l’emploi  et  du pouvoir  d’achat  du  21  août  2007,  dite  «loi  Tepa», dont la mesure phare était la suppression des droits de succession entre conjoints et  partenaires de pacs a lancée une grande vague de réformes successives sur les droits  de  succession. La loi Tepa a également institué une exonération permanente de droits de  donation,  à hauteur de 31 865 euros pour les dons familiaux de sommes d’argent consentis aux enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants et, pour  ceux  qui  n’ont  pas de descendants directs, aux neveux et nièces. Ces dons sont désormais renouvelables tous les 15 ans. Au cours de l’été 2011, le gouvernement  Fillon  est revenu en partie sur ce régime. Il a relevé les deux dernières tranches du barème  des droits applicables aux successions et donations en ligne directe  ainsi  qu’aux donations entre époux et partenaires de  PACS  :  elles  sont  ainsi  passées  de 35% à 40% pour la part taxable  comprise entre 0,9 et 1,8 million d’euros et de 40% à  45% pour celle  supérieure à  1,8  million   d’euros. L’été suivant, le régime fiscal des droits de donation et de  succession  a  été  à  nouveau  remanié, dans le cadre de  la loi de Finances rectificative du 16 août 2012. Première mesure : le montant de l’abattement applicable entre parent et enfant a été ramené de 159.325  euros  à 100.000  euros.  Le montant des autres abattements n’a pas été modifié, y compris celui applicable en faveur d’une personne handicapée, qui reste  fixé   à  159.325 euros. En outre, il a été mis fin au système d’indexation annuelle de ces abattements ainsi que des différentes tranches des barèmes des droits de donation et de succession. Autre modification notable mais qui s’applique cette fois-ci à toutes les successions : le délai du rappel fiscal des donations antérieures est relevé à quinze ans. Autrement dit, il faut désormais attendre quinze ans entre deux donations consenties à un même bénéficiaire pour que l’abattement dont il bénéficie se renouvelle pour pouvoir à nouveau profiter des tranches les plus basses du barème pour les donations dont le montant dépasse celui de l’abattement.

En moins de dix ans,  le régime  des droits de succession  s’est  donc considérablement alourdi et favorise moins les transmissions  anticipées. Reste qu’une  succession préparée coûte toujours moins chère qu’une succession subie.

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